Remarques sur des colloques AFPP concernant les mauvaises herbes.
Plan de cette page :
- COLUMA 2001 et CDrom vignobles
- biologie des mauvaises herbes 2004
- COLUMA 2004.

colloque du COLUMA 2001 (Toulouse)
Par rapport aux précédents colloques du COLUMA, il y a un léger recul de la proportion d'articles de marketing (fait par les firmes pour des matières actives essentiellement nouvelles) au profit de la lutte mécanique (en pays développés et tropicaux) et des résidus d'herbicides dans l'eau. Le désherbage des zones non cultivées est représenté dans une session ; les plantes aquatiques ont bien disparu (elles ont leur propre colloque, tel que celui de 2002 EWRS en Aquitaine).

Le niveau de science et de technique est variable selon les articles. On remarquera la qualité des interventions des chercheurs du CIRAD. A l'opposé des communications sont médiocres soit parce que la préparation a été trop hative, soit pour des lacunes de bibliographie (dans certains cas, les auteurs feraient même bien de relire les colloques précédents du COLUMA), soit par un contenu fantaisiste (certaines firmes, probablement en panne d'inspiration, en sont réduites à présenter l'emballage de leurs produits sous toutes ses coutures au sens propre et au figuré). Parallèlement, la résistance aux sulfonylurées n'est pas abordée.
Au niveau des thèmes traités, une nouveauté mérite d'être soulignée : ce sont les herbicides végétaux sélectifs (une communication sur des extraits de plante cultivée -Avena sativa- et une autre sur des extraits de mauvaise herbe -Artemisia annua-).
Dans la rubrique marketing est également à ranger la présentation du CD Rom sur la "flore des vignobles de France" (cf. apréciation personnelle plus loin).

Une honte personnelle à propos du stand me concernant et que je n'avais aucunement préparé : une collection de graines de mauvaises herbes et des plateaux de plantules (comme ce fut le cas au colloque de Reims) auraient été un minimum, ainsi qu'une présentation de nos formations en malherbologie.


Commentaires sur le CD Rom "Flore des vignobles de France" (groupe COLUMA vigne)
après l'avoir parcouru pendant quelques poses du colloque sur l'ordinateur en démonstration


Certaines définitions trouvées dans le glossaire peuvent laisser perplexe, en particulier celles ayant trait à la biologie. Ce ne sont pas forcément les sens utilisés classiquement par les botanistes. Il est difficile de se familiariser avec le vocabulaire et pour certains termes, même après avoir compilé tous les exemples dans les fiches "taxons", je ne parviens pas à élucider l'explication.

Pour la présentation de chacun des 130 taxons, l'information morphologique est disparate et souvent floue. La caricature est atteinte pour la majorité des Composées dont la description de l'inflorescence est du type "fleurs jaunes réunies au capitule" ; ceci permet simplement aux personnes suffisamment initiées aux familles de comprendre qu'il s'agit probablement d'une Composée, mais certainement pas de confirmer une détermination seulement du genre (et donc en aucun cas de l'espèce).
La description du port de la plante est souvent évoquée dans plusieurs expressions dont le sens n'est pas forcément explicite. La description du port des plantules est hétérogène ; pour Mercurialis l'information manque. La préfoliation de Lolium multiflorum serait peut être à revoir. Pour un grand nombre de plantes, l'utilisation d'un seul mot comme "subrosettée" (terme que je n'ai pas rencontré dans le CD Rom) au sens initial de Raunkiaer aurait certainement évité plusieurs périphrases ambiguës.

Pour la rubrique "biologie", on trouve des expressions complexes, difficiles à comprendre (même pour un spécialiste). La signification de certaines m'est restée énigmatique, y compris avec l'aide du glossaire. C'est le cas des mots "pluriannuelle, vivace, stolon, rhizome", d'usage varié (par exemple entre Potentilla, les Rumex et Sonchus arvensis) ; c'est également la cas de l'expression "germination de bourgeons sur les drageons" pour Hypericum perforatum.
Par contre les lacunes sont flagrantes : la saison de végétation qui est probablement le descripteur le plus important pour la lutte ne figure explicitement que pour Hedera helix. Les simples termes "estivale" ou hivernale" sont probablement absents du CD Rom. Des saisons de levée sont généralement indiquées mais la région pour laquelle elles sont valables n'est pas indiquée : ainsi, je me demande dans quelles régions des plantes comme Echinochloa ou Solanum nigrum ne lèvent pas au printemps (seul l'été est mentionné) ; dans l'ouest, j'ai l'habitude de les voir sortir surtout au mois de mai.
Poa annua est indiqué annuel ; en déterminant la plante avec une référence classique internationale, j'ai l'habitude d'avoir pour ce nom une plante stolonifère pérenne. Ce simple terme de "pérenne" (de valeur reconnue internationalement par les botanistes) n'est pas utilisé dans le CD Rom.

En ce qui concerne la nomenclature, dans quelques cas j'ai eu des difficultés ; il n'est pas indiqué de quelle référence de détermination connue des botanistes elle est extraite. Quelques synonymes auraient donné des repères.

Les photos sont sans échelle, autrement dit difficilement exploitables.

La répartition géographique est le résultat d'un travail très approximatif ; ce n'est pas parce qu'un taxon n'est pas signalé dans une région qu'il n'y est pas très envahissant et problématique dans certaines parcelles.

conclusion :
Ce n'est pas avec ce CD Rom que la détermination d'une plante va être certifiée, parfois bien au contraire.
La bonne information explicite est l'exception. Il convient de mettre en garde les praticiens vis à vis d'indications biologiques.
Il y aurait besoin d'une sérieuse relecture et d'un effort au niveau de la terminologie qui se devrait d'être simple pour un tel document sensé faire de la vulgarisation.

P.S. : Je déplore l'énergie dépensée pour commercialiser un tel document (puisqu'on a osé le vendre) ; si encore ce n'était que sur Internet en libre accès dans un forum pour commentaires...



XIIe colloque International sur la biologie des mauvaises herbes. 2004, AFPP Dijon.

En comparant aux colloques précédents, les thèmes et méthodologies présentent des points communs et des différences.

Des thèmes  quelques peu classiques :
Quelques inventaires : surtout méditerranéens de taxons classiques et ailleurs de taxons rares.
Compétition : seuils (encore appelés abusivement "seuils de nuisibilité"), mécanismes, amélioration des cv.
Approches paysagères par rapport aux pollens et à la dissémination/gestion de plantes résistantes
Pratiques culturales, permaculture
Lutte mécanique : destitution de plantules…
Lutte biologique, surtout autour de la Méditerranée, surtout spectres d'hôtes pour insectes et maladies
Dynamique de populations

Des thèmes nouveaux :
Apports de méthodes électroniques pour discerner les mauvaises herbes (lumière polarisée, réflectance).

Des thèmes en moins : de 2 types
- La phytosociologie sigmatiste a disparu. Elle est remplacée par des approches plus sérieuses d'inventaires
- Les inventaires et la répartition des populations devenues résistantes aux herbicides. On dirait que ce sujet est devenu tabou, et ceci d'autant plus qu'on parle de Graminées, de fop, de folle avoine.



19è Conference du COLUMA du 8-10 décembre 2004 à Dijon :
Voici certaines impressions négatives et inquiétudes personnelles.
(j'ai décidé de faire ce compte-rendu Après avoir regardé l'émission de France2 du 20 déc. 04 à 22h30 concernant
le suicide d'agriculteurs d'Inde ruinés après avoir cultivé du coton OGM avec des doses massives d'insecticides
et malgré tout infesté-ravagé d'insectes contre lesquels les méthodes de lutte habituelles n'étaient plus efficaces)

- peu d'inscrits par rapports aux précédents colloques

- je n'ai rencontré personne d'écoles d'ingénieurs agro

- la plupart des chercheurs de l'INRA particulièrement bouleversés par les dernières mesures du Ministère leur demandant de cesser de travailler en malherbologie et résistance aux herbicides - en gros, il faudrait qu'ils se recyclent en écologie du paysage

- un numéro de Phytoma-ldv distribué aux inscrits et intitulé "mauvaises herbes" : il est consacré aux herbicides et à un argumentaire (parfois de très bas niveau) en faveur de leur utilisation

- un représentant du Ministère de l'Agriculture et de la Forêt pour l'ouverture du colloque et lançant un appel aux firmes pour déposer plus de dossiers d'herbicides avec AMM en forêt (sous prétexte qu'il y a peu d'herbicides "forêts" par rapport aux herbicides "agriculture")

- les firmes se plaignent de la réglementation (parfois étrange)

- le niveau déplorable de certaines communications financées en grande partie au moins par la profession agricole :
 1er ex.) données de fréquence du "chiendent" (sans précision d'espèce alors que  répartition,  biologie,  luttes mécanique, culturale et chimique sont différentes selon les espèces)  -
 2è ex.) "implanter dans une parcelle propre" (bien évidemment sans recette pour obtenir la dite parcelle propre qu'il ne serait pas nécessaire de désherber)

 Conclusion :   L'Etat  français  supprime  la  malherbologie  publique,  et  réserve donc
la vulgarisation de la lutte contre les mauvaises herbes aux firmes phytosanitaires
(dont  la  recherche  et  le  savoir  privés  restent  confidentiels).
L'Etat tend à limiter ses fonctions officielles à l'aspect réglementaire de l'utilisation des herbicides.



Daniel Chicouène.
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